Exposition collective
Prismatiques, stratégie des petites faces
Exposition
PHILIPPE DECRAUZAT, CÉCILE DUPAQUIER, RONAN LECREURER, PASCAL POULAIN,
VICTOIRE THIERRÉE, RAPHAËL ZARKA
Les sculptures, dessins, films et photographies de cette exposition collective privilégient le polyèdre plutôt que le cube, la surface pliée ou plissée plutôt que plane, la structure prismatique ou cristalline plutôt que le volume lisse. Nul drapé cependant, nulle envolée : la pliure est franche, voire incisive, et cette esthétique de la facette n’apparente pas ces travaux au baroque auquel nous a communément renvoyé l’esthétique du pli. La retenue formelle s’accorde à la rigueur mathématique à l’origine de ces façonnages. De par leurs formes cristallines, les œuvres augmentent leurs zones de contact avec l’espace alentour pour un encombrement inchangé, complexifient et optimisent leur surface en la décomposant et par là multiplient ou étendent le potentiel d’informations et d’effets - texture, lumière, jeux d’optique - qu’elles nous communiquent.
Les philosophes (Deleuze, Derrida…) ont souvent considéré le pli comme le paradigme de l’état de changement dans la continuité. Ce parti pris plastique de la facette ne restreint en effet pas les œuvres au seul registre formel de leur apparente géométrie abstraite. Tout comme les fragments de miroir du célèbre Mirror Vortex de Robert Smithson (1964) diffractait son environnement pour signifier l’impossibilité du regard, le jeu cristallin des œuvres présentées ici réservent des stratégies agissant bien au delà de la forme seule : Raphaël Zarka a consacré toute une série de travaux (sculptures, dessins) à la complexité de la forme prismatique à partir d’une simple clé de châssis servant au peintre à tendre sa toile ; l’objet film de Philippe Decrauzat convoque quant à lui un parallèle entre l’histoire, tant mathématique que mythique, d’un polyèdre à 24 faces et la technique cinématographique ; les sculptures et bas-reliefs de Cécile Dupaquier se jouent de leur articulation à l’espace pour mieux en troubler notre perception, quitte à prendre quelque tournure anthropomorphe ; ceux de Victoire
Thierrée dévoilent l’exploitation ou le dévoiement des formes de la modernité par l’ingénierie militaire tandis que les photographies de Pascal Poulain les traquent dans l’architecture et le paysage urbain pour en faire résonner les jeux optiques et perceptuels au delà du cadre ; les sculptures de Ronan Lecreurer donnent implicitement à voir l’évolution anthropologique du regard et du positionnement du corps dans l’espace : en élevant progressivement notre point de vue, c’est tout notre vécu et notre perception corporels qui se détachent du paysage.
Facette : « petit visage », nous apprend le dictionnaire étymologique et, un peu plus tard, « une des petites faces d’un corps qui en a beaucoup »… Si cette esthétique de la facette peut parer l’exposition d’une certaine homogénéité et retenue plastiques, ses nombreuses « petites faces » induisent également une complexité telle qu’en détiennent la Melencolia d’Albrecht Dürer ou Le Cube d’Alberto Giacometti, de subtiles rencontres au croisement de champs sémantiques et culturels a priori disparates.
Anne Giffon-Selle
Infos utiles
AUTOUR DES EXPOSITIONS
- Club Sandwich vidéo - Mardi 27 Avril
HORAIRES :
Du mardi au samedi de 14h à 18h - le dimanche de 15h à 18h
PLUS D’INFOS :
Dossier de présentation Prismatiques
Cahier d’exposition