Exposition collective
Cum Panis
Exposition
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Co-commissariat : Grace Denis et Adeline Lépine
Avec des œuvres de Broudou Magazine, Grace Denis, Ymane Fakhir, Sameer Farooq, Ana Bella Geiger, Alison Knowles, Valeria Mata, Gordon Matta-Clark, Julia Morlot, Lúcia Prancha, Claude Ponti, Marie Preston, Lexie Smith et Louise Johansson Waite.
Avec des objets issus des collections du MuCEM, du Musée de Grenoble et du Musée de la Résistance et de la Déportation de Besançon.
Dans le cadre de Pays d’Agglomération de Montbéliard Capitale Française de la Culture 2024.
En 2022, la « baguette » et la « table » sont entrées au Patrimoine Immatériel de l’UNESCO. Les deux sont associées dans l’étymologie des termes compagne et compagnon issus du latin cum panis 1, « avec le pain » et renvoyant aux « convives d’une même tablée », soit celles et ceux avec qui l’on partage le pain.
Les liens entre les humain·es et le pain sont ancestraux. Mais quels sont-ils ? Que nous révèle le pain à travers sa production et sa consommation de nos manières de nous nourrir, de structurer nos sociétés ou encore de concevoir des modes d’interactions culturels collectifs ? Présent à travers le monde, que révèle-t-il à chaque fois de l’endroit où il a été conçu ou de celles et ceux qui ont contribué à sa conception de la production du blé et de sa farine, à sa cuisson en passant par son levain et son pétrissage ? Comment observer le pain à la fois comme produit d’une succession de technologies humaines, mais également comme un outil à la fois pragmatique et symbolique de la transmission de contextes spécifiques ?
Comme l’affirme le Groupe Blé 2, le pain est politique. Objet de controverse en raison des modes de production du blé contemporain et des dérives de l’industrie agro-alimentaire, le pain a également joué un rôle identifié dans l’emprise colonial. Mais il est également un outil de résistance populaire : de la foule réclamant à Marie Antoinette (dont la perruque était blanchie à la farine ou amidon de blé) le pain quotidien aux manifestations les plus contemporaines brandissant le pain comme étendard symbolique de la résistance.
S’intéresser au pain, c’est donc plonger dans de multiples histoires agricoles, culturelles, familiales, économiques et spirituelles de contextes socio-politiques complexes et très différents. C’est également observer de plus près un patrimoine mondial qui constitue un support de convivialité, d’invention et de création. Le pain dans ses multiples facettes suscite la curiosité, stimule la sensorialité, ouvre l’appétit. Pour toutes ses qualités, le pain traverse également l’histoire des pratiques artistiques : entre art et vie, art et science, comme matière à expérimentations, à enseignements et à partages. Il permet de se reconnecter aux contextes de création, aux pratiques artisanales, à la réanimation de savoirs oubliés de l’acte de créer… afin de faire en commun.
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In 2022, the “baguette” and the “table” were added to UNESCO’s list of Intangible Cultural Heritage.
Both are etymologically associated with the terms compagne and compagnon, derived from the Latin cum panis, “with bread”, and referring to “guests at the same table”, i.e. those with whom bread is shared.
The links between people and bread are ancestral. But what are they? Through its production and consumption, what does bread reveal about the way we eat, the way we structure our societies, and the way we conceive of collective cultural interactions? Present throughout the world, what does it reveal each time about the place where it was conceived, or about those who contributed to its conception, from the production of wheat and flour, to baking, leavening and kneading? How can we observe bread both as the product of a succession of human technologies, and as a tool both pragmatic and symbolic of the transmission of specific contexts?
As the Groupe Blé asserts, bread is political. Controversial because of contemporary wheat production methods and the excesses of the agri-food industry, bread has also played a role in colonial rule. But it is also a tool of popular resistance: from the crowds demanding daily bread from Marie Antoinette (whose wig was bleached with wheat flour or starch) to the most contemporary demonstrations brandishing bread as a symbolic standard of resistance.
Taking an interest in bread means delving into the many agricultural, cultural, family, economic and spiritual histories of complex and very different socio-political contexts.It also means taking a closer look at a world heritage that is a medium for conviviality, invention and creation.Bread, in all its many facets, arouses curiosity, stimulates the senses and whets the appetite.For all its qualities, bread also traverses the history of artistic practices: between art and life, art and science, as a material for experimentation, teaching and sharing. It allows us to reconnect with the contexts of creation, with artisanal practices, with the reanimation of forgotten knowledge in the act of creating… in order to do things together.
- Donna Haraway, Quand les espèces se rencontrent. Trad. de l’anglais (États-Unis) par Fleur Courtois-l’Heureux. Paris, La Découverte, 2021 ↺
- Groupe rassemblant des paysan·nes, des meuniers·ères, des boulangers·ères au sein de l’Association régionale pour le développement de l’emploi agricole et rural Auvergne-Rhône- Alpes. En 2019, ces membres publient un ouvrage à l’écho important : Notre pain est politique - les blés paysans face à l’industrie boulangère. Certain.es d’entre elles et eux sont également basé·es en Franche-Comté. ↺
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Grace Denis est à la fois co-commissaire et artiste dans le cadre de cette exposition Cum Panis.
Les matériaux de travail de Grace Denis sont le son, l’image et le comestible. Elle rassemble ces éléments sous forme d’installations interactives ou de situations hospitalières qui prennent racine dans la recherche agronomique, l’exploration de la dynamique de la biodiversité ou l’expérimentation d’un processus de cultures spécifiques qui peut lui-même être lié à un cycle lunaire. Attachées à la collaboration et à la participation, ses propositions artistiques sont d’abord conçues avec des agriculteurs et invitent ensuite d’autres savoir-faire (et notamment ceux de la cuisine). Le repas ou la consommation courante de matières comestibles deviennent des outils poétiques de transmission et de médiation qui nous invitent à reconsidérer la manière dont « nous avons désensibilisé notre rapport à la consommation » tout en (re)prenant conscience de notre rapport au vivant.
Pour le projet au 19, Crac, le souhait de Grace Denis est d’explorer l’histoire et les possibilités de réactivation du Four à pain Lespinasse du Fort du Mont Bart. A travers des recherches au sein des archives, une rencontre avec l’association du Four à Pain, mais également des échanges avec des agricultrices et agriculteurs, boulangers-paysans et boulangères-paysannes de la Région au sujet de la production du blé, l’artiste souhaite pour proposer une œuvre à la dimension performative, culinaire, participative mais également sonore ou sculpturale. Reprenant des principes de création déjà expérimentés précédemment, il s’agit pour elle de dresser un portrait de la production de pain locale ainsi que des formes de compagnonnages réelles ou à imaginer.
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Grace Denis’ working materials are sound, image and the edible. She brings these elements together in the form of interactive installations or hospitable situations rooted in agronomic research, the exploration of biodiversity dynamics or the experimentation of a specific cultivation process that may itself be linked to a lunar cycle. Committed to collaboration and participation, his artistic proposals are first conceived with farmers, and then invite other skills (notably those of the kitchen). Meals and the everyday consumption of edibles become poetic tools of transmission and mediation, inviting us to reconsider the way in which “we have desensitized our relationship with consumption”, while (re)becoming aware of our relationship with living things.
For the project at 19, Crac, Grace Denis’ aim is to explore the history and reactivation possibilities of the Lespinasse bread oven at Fort du Mont Bart. Through archival research, a meeting with the Four à Pain association, and discussions with local farmers, bakers and peasants on the subject of wheat production, the artist hopes to propose a work with a performative, culinary, participatory, sound and sculptural dimension. Drawing on previously-experienced creative principles, the aim is to draw up a portrait of local bread production, as well as real or imagined forms of companionship.